9 juil. 2010

RÉPONSE DE MADAME DU PLESSIS, ADJOINTE AU MAIRE DE LA BASTIDONNE EN CHARGE DU DEVELOPPEMENT DURABLE [08/07/2010]

Bonjour mademoiselle,

Je me permets de réagir en toute sincérité à vos propos. Une rocade est par définition une voie de dérivation. Dans les faits, il s'agit à La Bastidonne d'une petite route qui permettra de contourner le coeur village et d'éliminer à terme, dans notre rue principale : les bus, les camions et les voitures en direction de La Tour d'Aigues. C'est une décision du Conseil Général. Il s'agit bien ici d'oeuvrer pour la collectivité, la sécurité de tous, la qualité et le confort de vie mais aussi la qualité de l'air; La pollution est dans notre région élevée (pollution à l'ozone essentiellement) comme le révèlent les statistiques d'ATMO PACA, association en charge des mesures pour l'ensemble de la région dont vous trouverez les résultats sur le site suivant : www.airmaraix.com.
La Bastidonne est, en effet  un petit village où il fait bon vivre et c'est pour cette seule et unique raison qu'une déviation (ou plutot un contournement), comme vous l'appelez, voit le jour. Notre village est aujourd'hui envahi par les voitures individuelles, ce qui nuit à l'attractivité du village et à son développement économique contrairement à ce que vous affirmez. Seule la qualité, la tranquillité et la typicité des lieux favoriseraient un passage saisonnier et le bon fonctionnement de nos commerces. Quant au drame écologique dont vous parlez, il m'est difficile de le cerner : parlez vous de qualité paysagère, de perte de biodiversité, de plantes endogènes que nous ne connaîtrions pas... Difficile de saisir ce que désigne cette expression non étayée : catastrophe écologique. La voiture, les camions sont une catastrophe écologique (première source de gaz à effets de serre en France sans parler d'accidents et de risques) mais un contournement permettant de désengorger le village et de protéger les enfants j'en suis moins sûre.
Peut-être alors, parlez-vous de catastrophe paysagère, encore une fois, laissez moi en douter ou vous inviter à revisiter le tracé de cette petite route, qui a terme, débouchera devant la zone d'activité afin que les camions puissent y accéder. Voila qui en terme économique est essentiel pour nos entreprises.
Quelle eut été votre réaction si vos parents n'habitaient pas à quelques encablures de cette déviation ? Sûrement auriez-vous trouvé cela fort pertinent et allant dans le sens de l'intérêt collectif, d'autant qu'aujourd'hui vous habitez loin, dans d'autres régions, d'autres pays avec la nostalgie d'une Bastidonne idéale,  figée dans les souvenirs de l'enfance.

La critique est facile mais non constructive surtout lorsqu'elle ne prend pas en considération l'ensemble des paramètres car s'il est une commune qui agit pour un développement durable, c'est bien La Bastidonne (pour preuve vous recevrez en septembre le diagnostic territorial en matière de développement durable, il sera distribué avec le bulletin et nous en profiterons pour faire un appel à la population qui désire participer à la conception du programme d'action). Pédibus pour les enfants, abondement du COS dans le PLU (20%) pour les constructions écologiques, changement de l'éclairage public, isolation des équipements publics, installation d'un chauffe-eau solaire pour l'école et l'appartement attenant, choix systématique de plantes vivaces pour limiter la consommation d'eau, création de nouvelles voies de déplacement doux, production d'huile d'olive bio pour les enfants de la cantine, instauration d'un repas bio mensuel à la cantine (repas à base de produits issus de l'agriculture locale), assainissement > à 95% (un record), records aussi en matière de tri sélectif, installation d'un point de covoiturage, de composteurs... Le développement durable et la protection de l'environnement sont comme vous le voyez une préoccupation permanente jusque dans les achats que nous effectuons au quotidien, je vous prie donc de considérer que cette déviation a  pour seul et unique objectif le bien-être des Bastidonnais. Le développement durable, ce sont des évaluations et des choix, les inconvénients de cette route étant minimes à tous les niveaux mais les avantages considérables, celui-ci a été vite fait.

Je vous félicite, en revanche, pour la création de ce blog qui montre votre investissement en tant que citoyenne et permet à la population d'échanger. Je vous informe juste du fait qu'un journal spécial PLU a été distribué à l'ensemble du village, que trois réunions publiques ont eu lieu et que dans le cadre de l'agenda 21, une matinée de concertation sur diverses thématiques est organisée tous les ans, nous avons aussi un site (auquel nous adhérons depuis peu) dédié à l'échange avec la population (ideesplus.org), en complément nous avons mis un cahier à disposition de la population afin de recueillir les attentes des Bastidonnais. Comme vous le voyez, la concertation est dorénavant constitutive des démarches de la commune.

L'ensemble de l'équipe municipale, reste à votre entière disposition pour échanger sur cette route et sur le sujet du développement durable. Vos propositions sont bien évidemment les bienvenues, peut-être avez-vous imaginé des solutions plus adéquates, nous sommes curieux et demandeurs d'expertise alors n'hésitez pas à nous en faire part ou à venir nous rencontrer lors de votre prochain passage au village.

En vous remerciant de l'intérêt que vous portez à notre commune, je vous prie d'agréer l'expression de mes salutations distinguées. Hélène du Plessis (adjointe au maire en charge du développement durable).

Ps : c'est avec plaisir que j'aurais diffusé ce texte dans votre blog pour l'alimenter mais malheureusement il ne l'a pas accepté, trop long.



RÉPONSE DE JULIETTE DELESCLUSE, HABITANTE DU VILLAGE

Madame Du Plessis,

Je vous remercie pour votre sincérité et souhaite vous répondre sur plusieurs points que vous évoquez.

1) Vous parlez certes d'une « petite » route », nous pouvons avoir différents critères de perception des dimensions, chacun appréciera si le premier  tronçon qui va jusqu’au cimetière est une petite route ou, disons le, une route de jonction entre deux routes départementales. De plus, il me semble important de rappeler que la construction d’une route veut inévitablement dire par la suite constructions et habitations le long de cette route et peut-être même au final un rond-point. De nombreux villages ont ainsi perdu leur caractère typique par un assemblage de pavillons faussement atypiques. Je vous invite à consulter sur ce site traitant de comment ainsi « la France est devenue moche » (http://www.telerama.fr/monde/comment-la-france-est-devenue-moche,52457.php).


2) Vous parlez « d'éliminer à terme, dans notre rue principale: les bus, les camions et les voitures ». Je vous répondrais par deux questions :

- Est-ce qu’une étude d’impact a été menée sur l’ensemble du projet par le Conseil Général en amont de la construction de cette route comptabilisant le nombre exact de camions et autres véhicules traversant le village par semaine ?

Cela aurait du être fait. En effet, selon l’article L122-1 du Code de l’environnement : « Les travaux et projets d'aménagement qui sont entrepris par une collectivité publique ou qui nécessitent une autorisation ou une décision d'approbation, ainsi que les documents d'urbanisme, doivent respecter les préoccupations d'environnement. Les études préalables à la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages qui, par l'importance de leurs dimensions ou leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce dernier, doivent comporter une étude d'impact permettant d'en apprécier les conséquences. Cette étude d'impact est transmise pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement par l'autorité chargée d'autoriser ou d'approuver ces aménagements ou ces ouvrages. »

- Pourquoi ne pas nous dire immédiatement et officiellement que vous souhaitez interdire dès maintenant l’accès aux camions et aux bus dans le centre du village. Les habitants seraient ainsi informés et pourraient avoir une vision clair de vos objectifs. Il est tout à fait possible d’interdire dès maintenant l’accès du village aux camions (sauf aux bus scolaires) sans pour autant construire une nouvelle route. Il suffit des les obliger à utiliser les départementales déjà existantes (RD 973 puis la RD 246 Pipallier ou La Blancherie) pour rejoindre la zone artisanale ou la Tour d’Aigues. Lorsque l’on considère le coût environnemental et économique de cette rocade, il serait bien moins coûteux selon moi de les inciter à faire quelques kilomètres de plus et utiliser les infrastructures routières déjà existantes et cela ne pénaliserait pas plus qu’aujourd’hui les entreprises de la zone « artisanale » du village.

4) Je suis certes au regret de constater comme vous que la région PACA est une des régions les plus polluées de France, voire même la plus polluée. Ceci est majoritairement causé par les industries se trouvant à Fos-sur-mer et près de l’étang de Berre. Néanmoins, l’utilisation des véhicules est un facteur important de pollution atmosphérique mais construire une route supplémentaire à la Bastidonne, d’une part ne déplacera que de quelques centaines de mètres les rejets de gaz des véhicules (ceux-ci étant par définition volatiles finiront bien par rejoindre le village) et d’autre part  ne résoudra pas le problème plus global de la place de la voiture dans nos sociétés, n’empêchant pas aux véhicules de rouler là ou ailleurs et donc de polluer. Pire encore il ne fait que l’aggraver, construire une nouvelle route n’incite qu’à l’utilisation de voitures et à en faire sa promotion. Enfin, notre village subira la pollution de nouveaux véhicules venant du sud est de La Tour d’Aigues qui emprunteront cette route pour rejoindre plus rapidement Pertuis. J’ai déjà été informé par des habitants de ce secteur de La Tour d’Aigues qu’ils utiliseront cette route. Le problème de la pollution atmosphérique passe par une résolution combinant niveau global et niveau local.

5) Je suis tout à fait d’accord avec vous pour chercher à maîtriser le trafic des voitures dans le centre du village à la fois pour des raisons de bien-être mais aussi de sécurité. Cela peut passer dans un premier temps et immédiatement par l’implantation de ralentisseurs de dernière génération à l’entrée et dans le centre village. Et aussi par le fait de repeindre les passages piétons et de limiter les vitesses de circulation à 30 km/h à l’entrée du village et 15km/h dans le village. D’autre part, comme je l’ai déjà évoqué plus haut, cette nouvelle route risquera même d’aggraver la situation en permettant aux automobilistes habitant le secteur sud-est de La Tour d’Aigues (Bourguette ou Verdache par exemple) d’utiliser plus volontiers cette rocade jusqu’à la départementale vers Pertuis plutôt que de traverser La Tour d’Aigues aux heures de pointe.

2) Vous dites, c’est « une décision du Conseil Général ». Cela veut il dire que nous n’avons plus notre mot à dire? Existe-t-il peut être des raisons dépassant notre simple vie de village et impliquant aussi la commune voisine  de La Tour d’Aigues (notamment pour désengorger la Tour d’Aigues secteur sud-est)? Dans ce cas qu’elles sont elles et avons-nous à les subir et à les accepter dans notre PLU sans connaissance de cause ?

6) J’utilise la notion de « désastre écologique » pour qualifier la construction de cette route car, à mon sens, cette dernière est un projet surdimensionné par rapport aux besoins réels et qui entraînera, nous l’avons vu avec la première phase de ce projet, la destruction de paysages « exceptionnels », de vignes d’agriculteurs, d’arbres et plantes sauvages, d’animaux vivant là, et ce ne sont pas des plantes de décors plantées pour « masquer le tout » qui pourront les remplacer. C’est à toutes ces notions que je me réfère car comme vous le savez l’écologie renvoie à des thématiques environnementales et sociales. Enfin, vous remarquerez que je ne parle pas de « développement durable » car je considère personnellement que cette notion a été vidée de son sens par une utilisation à tort et à travers. C’est selon moi une notion trop fragile et trop précieuse, une question qui renvoie à des choix certes mais aussi aux notions d’équilibre et de mesure. Ce qui avec ce projet ne semble pas être le cas.

7) Vous considérez que je garde de l’image nostalgique d’une « Bastidonne idéale,  figée dans les souvenirs de l'enfance ». Détrompez-vous, c’est aujourd’hui avec un regard d’adulte que je regarde le village de mon enfance. Je n’ai jamais autant souhaité qu’aujourd’hui de le voir se développer de manière harmonieuse, raisonnée et en consultation avec les habitants. Et c’est bien que parce ce que j’aime la Bastidonne, même à distance et via Internet, que je m’engage aujourd’hui et m’oppose à ce projet que je considère comme allant à l’encontre d’un développement maîtrisé de notre village .

8) En effet, mes parents n’habitent pas loin du tracé de la nouvelle route. Ils auraient donc tout intérêt à ce que la route se fasse car, inévitablement à plus ou moins long terme, les terrains bordant les routes deviennent constructibles. Leur terrain pourrait être découpé en parcelles et vendu au prix fort pour la construction de nouvelles maisons le long de la route. J’aurais pu habiter à l’autre bout du village ou dans un tout autre village, ma position aurait été la même car c’est le projet en tant que tel que je trouve nocif et dangereux (mon côté écologiste), la manière dont les habitants ont été mis devant le fait accompli sans enquête publique sur l’ensemble du projet (mon côté juriste), et enfin économiquement coûteux pour un projet dont les effets bénéfiques sont non justifiés par une étude d’impact au préalable (mon côté vie politique). La Bastidonne est un petit village et chaque habitant sera touché directement ou indirectement par ce projet.

Finalement vous m’accusez de m’être opposée à ce projet pour simple intérêt privé, je considère que ce n’est nullement le cas et qu’il n’a pas lieu d’ouvrir le thème des intérêts privés des uns et des autres – car il y aurait, je crois, des choses à dire et nous tomberions vite dans la polémique. 

9) Je salue les différentes initiatives que vous citez et les efforts investis par la mairie en matière de développement durable et de consultation des citoyens.

Mais alors dites-moi pourquoi ?
- lorsque je me suis rendue en mairie en août 2009, on m’a dit qu’aucun projet à l’ouest du village n’était prévu ;
- que le Conseil général n’ait pas répondu à mes demandes de documents légaux portant sur le projet ;
- qu’aucun plan du projet en entier n’est été affiché en mairie lors des travaux de la première phase, ainsi qu’un panneau officiel et réglementaire mentionnant le montant des travaux et la liste des entreprises attributaires des marchés.
- qu’aucune enquête publique n’ait été menée en préalable aux travaux et sur l’ensemble du projet.

Si cette déviation « a  pour seul et unique objectif le bien-être des Bastidonnais », je vous cite, pourquoi alors ne pas leur avoir demandés leur avis ? Pour un projet aussi important pour l’avenir de notre village et son environnement naturel, la légitimité des élections municipales ou départementales n’est pas suffisante, les codes administratif et de l’environnement le confirment.

10) Vous êtes prête à écouter mes propositions et je vous en remercie. Il me semble qu’il y en a déjà certaines bien concrètes dans ce texte. Je ne manquerai pas de vous en faire d’autres prochainement et j’invite toutes les personnes lisant ce blog à me faire parvenir les leurs ainsi que leurs réactions et opinions (via l’option commentaires du blog ou par email). Je les publierai ensuite. La critique ne serait que trop facile.

Je suis tout à fait d’accord pour vous rencontrer lors d’une réunion publique, au cours de laquelle nos concitoyens seraient conviés, ainsi que les élus du conseil  municipal et du conseil général.

Et je vous affirme encore une fois que, comme vous, je souhaite profondément que La Bastidonne préserve son harmonie tout en poursuivant son développement – mais de manière raisonnée et après réflexion collective.

Je vous prie d’agréer, Madame Du Plessis, mes salutations les plus distinguées.

Juliette Delescluse

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